En gestation depuis plusieurs années, la réforme du droit des sûretés s’est enfin concrétisée par l’adoption d’une ordonnance datée du 15 septembre dernier (ordonnance 2021-1192 portant réforme du droit des sûretés, JORF 16 sept.).
Bien que cette matière ait été refondue il y a à peine 15 ans, le besoin d’une nouvelle réforme se faisait sentir. Le régime de certaines sûretés n’avait en effet pas été modifié par l’ordonnance du 23 mars 2006 du fait d’une habilitation seulement partielle donnée au gouvernement.
Cela s’explique par le refus des parlementaires de déléguer à l’exécutif le pouvoir de réformer le régime du cautionnement et des privilèges par ordonnance du fait du caractère jugé stratégique de ces mécanismes.
La persistance d’un besoin de modernisation du régime de ces deux sûretés, la nécessité d’ajuster certains aspects de la réforme de 2006 et de mettre en cohérence la réglementation avec des réformes intervenues dans d’autres secteurs (le droit des contrats notamment) ont convaincu les pouvoirs publics de la nécessité de remettre l’ouvrage sur le métier.
La banalisation du recours aux ordonnances aura eu raison des résistances passées. L’article 60 de loi PACTE du 22 mai 2019 a habilité le gouvernement à retoucher par ordonnance le droit des sûretés. Après un retard de quelques mois imputable à la crise sanitaire, le texte est paru.
Sa teneur s’inspire largement de l’avant-projet de réforme publié en 2017 par l’association Henri Capitant et élaboré par la commission de réflexion Grimaldi.
La réforme poursuit trois objectifs clairement affichés par le rapport au Président de la République accompagnant l’ordonnance : la sécurité juridique grâce à l’amélioration de l’accessibilité et de la lisibilité de la matière, l’efficacité des sûretés « tout en maintenant un niveau de protection satisfaisant des constituants et des garants » et enfin, l’attractivité du droit français.
Les objectifs sont ambitieux et seules la pratique et l’expérience des nouveaux textes permettront de juger de leur bonne réalisation.
La réforme couvre un large spectre puisque presque toutes les sûretés sont concernées. Le droit du cautionnement est largement remanié du fait d’une réécriture intégrale du chapitre 1 du Titre I du Livre IV du Code civil.
Les dispositions relatives aux garanties autonomes et aux lettres d’intention issues de la réforme de 2006 ne sont, à l’inverse, ni complétées, ni modifiées. De nombreuses dispositions dédiées aux sûretés réelles sont également retouchées. Parmi les changements notables, signalons la disparition des privilèges immobiliers et leur transformation en hypothèques légales ainsi que la consécration de la cession de créance et de la cession de somme d’argent à titre de garanties.
Le gage, le nantissement et l’hypothèque font également l’objet de modifications affectant leur régime.
L’article 37 contient des dispositions transitoires. L’entrée en vigueur de l’ensemble des dispositions de l’ordonnance est prévue pour le 1er janvier 2022.
En ce qui concerne les cautionnements – qui sont des sûretés d’origine conventionnelle – il est prévu que les nouvelles dispositions ne s’appliqueront qu’aux cautionnements conclus postérieurement à cette date conformément au principe classique de survie de la loi ancienne en matière contractuelle.
Les praticiens devront donc prêter une particulière attention à la date de conclusion du cautionnement.
Un projet de loi de ratification devra être déposé dans les quatre mois suivant l’adoption de l’ordonnance. Pour des raisons évidentes de simplicité dans le maniement de la réforme, il serait opportun qu’il s’agisse d’une ratification sèche et non substantielle à la différence de la loi du 20 avril 2018 ayant ratifié l’ordonnance portant réforme du droit des contrats.