ARTICLES

Contestation des honoraires d’avocat : procédure et délais


13 novembre 2024
Par Marie Potus



  • Civ. 2e, 24 octobre 2024, n°22-18.471

 

La contestation des honoraires d’un avocat par son client est soumise à une procédure rigoureusement encadrée. Par cette décision, la Cour de cassation réaffirme le caractère impératif des délais dans ce type de litige ainsi que le respect du principe du contradictoire, en considérant que le client, régulièrement convoqué, dispose de la possibilité d’exposer ses moyens en audience.

À l’origine de la décision, un client, en désaccord avec son avocat sur le montant des honoraires, saisit le bâtonnier de l’ordre d’une contestation sur les honoraires dus. En l’absence de décision du bâtonnier dans le délai prévu, il saisit directement le premier président d’une cour d’appel par lettre du 10 décembre 2020. Convoqué à une audience par lettre recommandée dont il signe l’avis de réception, le client ne se présente pas. Le premier président déclare le recours irrecevable pour tardiveté. Le client se pourvoit en cassation.

Il reproche à l’ordonnance de déclarer son recours irrecevable alors d’une part que le juge, qui est tenu de respecter le principe de la contradiction, n’aurait pas dû statuer en l’absence de débat contradictoire, le client n’ayant pas comparu à l’audience et d’autre part, que la recevabilité de son recours aurait dû être appréciée au regard de sa seconde saisine auprès du bâtonnier, initiée après l’absence de décision lors de la première contestation d’honoraires, et non sur la base de la première procédure, ce qui constitue, selon lui, une violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ainsi que des articles 175 et 176 du décret du 27 novembre 1991.

La Cour de cassation valide néanmoins l’ordonnance. Elle souligne, en premier lieu, que si en procédure orale, le juge doit, en vertu de l’article 16 du code de procédure civile, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ce qui implique qu’il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, le juge peut toutefois, sans méconnaître ce principe, statuer sur les prétentions du défendeur comparant à l’audience dès lors que le demandeur a été convoqué régulièrement à l’audience et qu’il n’a pas été dispensé d’y comparaître. Elle rappelle ainsi que le client ayant été convoqué en bonne et due forme dispose de la possibilité d’exposer et défendre ses moyens en audience.

En second lieu, la Cour rappelle que la recevabilité du recours en contestation d’honoraires devant le premier président de la cour d’appel doit être appréciée au regard du respect des délais fixés par les articles 175 et 176 du décret du 27 novembre 1991. Ces articles prévoient qu’en cas de silence du bâtonnier pendant un délai de quatre mois (prorogeable une fois), le client peut saisir le premier président dans le délai d’un mois suivant l’expiration du délai imparti au bâtonnier. Or en l’espèce, le client, après une première saisine du bâtonnier le 28 septembre 2018 restée sans réponse, a attendu jusqu’au 10 décembre 2020 pour saisir le premier président, soit bien au-delà du délai d’un mois suivant l’expiration du délai initial. En conséquence, c’est sans méconnaître les termes du litige que le premier président a souverainement analysé la lettre de saisine et a exactement déduit que celle-ci était irrecevable comme tardive. Le fait d’introduire une nouvelle demande de contestation d’honoraires ne permet donc pas d’effacer les effets de la première saisine ni de prolonger indéfiniment les délais de recours en l’absence de décision du bâtonnier dans le cadre de la première procédure.





LES AVOCATS ALTA-JURIS