L’article L 271-1 du Code de la construction et de l’habitation permet de « purger » la notification irrégulière d’un droit de rétractation. Mais jusqu’à la signature de l’acte authentique, le sort de la vente est entre les mains de l’acquéreur.
On sait que, pour « tout acte ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation, la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété d’immeubles d’habitation ou la vente d’immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière », l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation instaure au profit de l’acquéreur non professionnel une faculté de rétractation dans le délai de sept jours, passé à dix jours depuis la loi du 6 août 2015, à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte ». Cet acte doit être « notifié à l’acquéreur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise ». Ces dispositions ne s’appliquent toutefois qu’au seul contrat préliminaire si un tel contrat précède l’acquisition.
En l’espèce, des époux ont procédé à un investissement immobilier locatif en se portant acquéreurs d’un appartement et d’un emplacement de stationnement vendus en l’état futur d’achèvement. Mais la notification du contrat préliminaire de réservation a été adressée aux deux époux dans un courrier unique, et seul un des époux a signé l’accusé de réception.
Sans doute mécontents de leur investissement, les époux ont alors souhaité revenir sur celui-ci et ont soutenu à cette fin que la notification n’avait pas pu produire son effet à l’égard de celui qui n’avait pas signé l’accusé de réception, de sorte que le délai de rétractation de sept jours n’avait pas commencé à courir à son égard.
Cependant, la Cour de cassation (Cass. Civ. 3, 7 avril 2016, n° 15-13.064 ; L.Leveneur, Irrégularité de la notification nécessaire à la purge du droit de rétractation de l’acquéreur d’un bien d’habitation : l’acte authentique de vente peut-il être valablement établi ?, Contrats, Conc., Cons. Juillet 2016, comm.162) a refusé de les suivre dans leur argumentation et a décidé, procédant par substitution de motifs, que « la signature par les acquéreurs de l’acte authentique de vente vaut renonciation à se prévaloir de l’irrégularité de la notification du droit de rétractation prévue à l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation ».
Cette décision peut s’expliquer par le caractère d’ordre public (de protection) de l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation. En effet, il est possible de renoncer à un droit d’ordre public lorsqu’il est acquis. Or, il en est ainsi dès lors que l’acquéreur savait qu’il disposait d’un droit de rétractation (la Cour d’appel ayant constaté que les époux avaient bien été informés de la faculté de rétractation qui leur était ouverte). Par conséquent, les époux pouvaient y renoncer, ce qu’ils ont fait tacitement en signant sans réserve l’acte authentique de vente.
L’intérêt pratique de cette décision est très clair : il permet, lorsqu’un droit de rétractation n’a pas été « purgé » par une notification correcte du contrat préliminaire, de conclure valablement l’acte authentique de vente sans avoir à procéder au préalable à une nouvelle notification. Mais jusqu’à la signature de cet acte authentique, le sort de la vente est, faute de notification régulière, entre les mains de l’acquéreur.
Annabel QUIN,
Maître de conférences à l’Université de Bretagne-Sud
Ancienne avocat au Barreau de Paris
Mise en ligne: 15/03/2017